Peintures d'un camp de prisonniers de guerre (PG)
Cette histoire a été rédigée par Gail Delaney, la fille d'un prisonnier de guerre de Hong Kong. Son père, M. John « Jack » Burton fut capturé par l'ennemi à Hong Kong avant même que son navire n'accoste. Il fut prisonnier de guerre (PG) pendant quatre longues années et vécut dans des conditions horribles. Mais dans l'un des camps de prisonniers, il se lia d'amitié avec un autre prisonnier, un artiste du nom de William Allister.
Deux peintures. Deux vies. Une expérience commune. Cette histoire porte sur « l'art dans un camp de prisonniers » et prouve que rien ne peut venir à bout de l'esprit humain, même dans les moments les plus sombres.
À l'âge de 22 ans, mon père, John Burton, s'enrôla dans l'Armée à Toronto pour découvrir le monde. À l'automne 1941, 1 975 soldats canadiens furent déployés à Hong Kong. Après l'inévitable entrée du Japon dans le théâtre de guerre, les dirigeants savaient qu'il n'y avait aucun espoir de remporter la victoire, d'évacuer ou d'envoyer du renfort – et ils avaient raison.
Le jour de Noël, 17 jours après l'attaque sur Pearl Harbor, les troupes alliés, massivement surpassées en nombre, capitulèrent. Parmi les troupes canadiennes, 290 furent tués et 1 675 furent faits prisonniers de guerre. Au cours des 44 mois suivants, ils subirent un traitement qui ne s'apparente en rien à celui qui est réservé aux prisonniers de guerre conventionnels.
Mon père faisait partie de ces PG qui parlent rarement des quatre années cauchemardesques qu'ils vécurent, sauf lorsqu'il voulait nous culpabiliser afin que nous finissions notre assiette parce qu'il ne tolérait pas le gaspillage – surtout quand il s'agissait de nourriture.
Un autre PG, William Allister, de la Colombie-Britannique, avec qui mon père s'était lié d'amitié, était à la fois artiste et écrivain. Cette peinture est l'une des deux que William réalisa pour mon père en 1942. Il se servit d'un morceau de tente comme toile, attacha des poils d'une brosse à souliers sur un bâton pour en faire un pinceau, et utilisa de l'huile à moteur et des canneberges en guise de peinture.
Cette peinture représente les aires de logement gardées, l'autre montre un navire en train de couler dans la baie de Hong Kong.
Les peintures furent cachées jusqu'à ce qu'elles sèchent. Mon père les roula ensuite et les cousit à l'intérieur de la jambe de son pantalon où elles demeurèrent pendant trois ans.
Au moment de leur libération, en septembre 1945, 267 des PG étaient morts et les autres s'accrochaient péniblement à la vie.
Les PG furent envoyés par bateau à Vancouver pour y être hospitalisés et subir un examen mental et physique complet. Lorsque mon père retourna à Toronto, il fit nettoyer et encadrer les deux peintures. Elles sont demeurées accrochées toute ma vie au-dessus du divan dans le salon familial.
Après le décès de mes parents, j'ai apporté les peintures dans ma maison, à l'Île-du-Prince-Édouard, où elles sont accrochées au-dessus du divan dans le salon pour perpétuer le souvenir.
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