Gladys (Hawkins) McKenzie
Le récit qui suit provient de Ruth McKenzie, de la région des Prairies. C'est le récit que sa mère, Gladys (Hawkins) McKenzie, lui a fait du temps de la guerre.
« En octobre 1942, après les récoltes, je me suis engagée à Moose Jaw dans le Programme de formation d'urgence en temps de guerre. J'avais 22 ans et j'avais grandi sur une ferme à 70 kilomètres au sud-est de Moose Jaw. Le programme m'a donné une formation de travail en atelier et j'ai appris à utiliser des appareils tels que le tour, le rabot et la perceuse. J'ai aussi appris à faire du dessin technique, à lire des plans et à fabriquer à la main des pièces en métal. La John Ingles War Factory à Toronto m'a engagée, tout comme une quarantaine d'autres filles du programme réalisé à Moose Jaw.
Nous nous sommes rendues à Toronto en train dans le luxe d'un wagon privé et nous avons aimé notre voyage, qui a duré deux jours et deux nuits. À Toronto, quelqu'un nous attendait à la gare; nous étions logées dans des maisons privées et on nous a dit à quelle section nous devions nous présenter à l'usine. Comme nous étions toutes logées à des endroits différents, travaillions dans des sections différentes de l'usine et avions des horaires de travail différents, nous ne nous sommes pas vues beaucoup une fois à Toronto.
Le premier jour, j'ai dû me rendre à l'arrêt du tramway dans l'obscurité des premières heures d'un matin de décembre; il faisait vraiment noir, car Toronto avait deux heures d'avance sur l'heure normale. Je n'avais aucune idée du temps qu'il me faudrait pour traverser la ville. Le conducteur annonçait les noms de rues, qui, à cause de son accent anglais, semblaient tous identiques. Le trajet a duré plus d'une heure et, parce que j'avais peur de rater mon arrêt, je lui demandais sans cesse si c'était le mien. Je gage qu'il était heureux quand je suis enfin descendue.
À l'usine John Ingles, j'étais affectée à la division de finition du canon de la mitrailleuse légère Bren, où j'ai travaillé un an, après quoi j'ai été mutée à l'une des divisions de fabrication du canon. Pour ce travail, nous utilisions des meules mécaniques afin de façonner et de lisser le canon selon des spécifications précises. Mon quota quotidien était de 500 canons. Si l'une des autres personnes préposées à l'outillage était absente, nous devions nous charger de l'appareil supplémentaire et respecter le quota quotidien de l'unité.
Je gagnais 42 dollars par semaine et ma chambre m'en coûtait 20 par mois. À l'usine, un repas chaud complet coûtait 35 cents et je réussissais à prendre de petits repas dans ma chambre. Quitter le foyer familial et travailler dans une usine était pour moi toute une expérience. J'ai appris à m'adapter, mais je n'ai jamais voulu rester à Toronto. Je me suis fait de bons amis à l'usine et nous avons eu quelques bons moments ensemble, mais, après trois ans, j'étais prête à retourner en Saskatchewan aider mon frère aîné sur sa ferme.
Je sais que les armes que nous fabriquions avaient pour but d'aider à gagner la guerre, mais il était triste de passer près du local de l'expédition et de voir toutes les armes et les caisses empilées. Je pensais à tous ces hommes qui se tiraient dessus et je pensais à mon ami, qui était outre-mer. Heureusement, il est revenu indemne et nous nous sommes mariés en 1947, mais ça c'est une autre histoire. »
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