Les vétérans autochtones
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Les membres des Premières Nations, les Métis et les Inuits du Canada ont une longue et fière tradition de service militaire pour notre pays. Bien que des statistiques exactes soient difficiles à compiler, le taux de participation des Autochtones aux efforts militaires du Canada au cours des dernières années a été impressionnant. Ces volontaires déterminés ont souvent été contraints de surmonter de nombreux défis pour porter l’uniforme, que ce soit pour apprendre une nouvelle langue, pour s’adapter aux différences culturelles ou pour avoir à parcourir de grandes distances à partir de leurs communautés éloignées simplement pour s’enrôler.
Première Guerre mondiale
La Première Guerre mondiale a fait rage de 1914 à 1918, et plus de 4 000 Autochtones ont porté l’uniforme au cours de ce conflit. Ce fut une participation remarquable et, dans certaines régions, un homme sur trois aptes au combat s’est porté volontaire. En effet, certaines communautés (comme la bande Head of the Lake en Colombie-Britannique) ont vu tous leurs hommes âgés de 20 à 35 ans s’enrôler. Les recrues autochtones se sont enrôlées pour diverses raisons : la recherche d’un emploi ou d’aventure, ou encore dans le but de maintenir une tradition qui avait vu leurs ancêtres combattre aux côtés des Britanniques dans les précédents efforts militaires comme la guerre de 1812 et la guerre d’Afrique du Sud.
De nombreux hommes des communautés autochtones avaient de précieuses compétences lorsqu’ils se sont enrôlés dans les forces armées. La patience, la ruse et l’adresse au tir étaient des traits de caractère bien reconnus de ceux qui venaient de communautés où la chasse faisait partie de la vie quotidienne. Ces attributs ont aidé beaucoup de ces soldats à devenir d’excellents tireurs d’élite et des éclaireurs (soldats qui traversent secrètement les lignes du front pour recueillir de l’information sur l’ennemi). Au moins cinquante médailles pour actes de bravoure ont été décernées à des soldats autochtones pendant la guerre. Henry Louis Norwest, un Métis de l’Alberta et l’un des plus exceptionnels tireurs du Corps canadien, détenteur d’un record de division pour le tir d’embuscade de 115 coups de feu mortels, s’est vu décerner la Médaille militaire avec barrette pour son courage sous le feu de l’ennemi. Francis Pegahmagabow, un Ojibwa de l’Ontario, a été un autre tireur d’élite et l’un des rares Canadiens à recevoir une Médaille militaire avec deux barrettes pour ses actes héroïques répétés pendant le conflit.
Edith Anderson Monture, une jeune femme de la Réserve des Six nations de Grande-Rivière en Ontario, a porté l’uniforme d’une manière distincte. En 1917, cette infirmière qui avait travaillé aux États-Unis s’est rendue en France pour aider à soigner les malades et les blessés dans un hôpital militaire américain. Elle a parlé, après son retour au Canada, des destructions dont elle a été témoin :
« Nous pouvions marcher là où les combats avaient eu lieu. C’ était une vision terrible : des bâtiments en
ruine, des arbres brûlés, des douilles partout, des villes entières détruites. »
Seconde Guerre mondiale
Lorsque la Seconde Guerre mondiale a éclaté en septembre 1939, de nombreux Autochtones ont encore une fois répondu à l’appel du devoir et se sont engagés dans les forces armées. En mars 1940, plus d’une centaine d’entre eux s’étaient déjà portés volontaires. À la fin du conflit en 1945, plus de 3 000 membres des Premières Nations, ainsi qu’un nombre inconnu de Métis, d’Inuits et d’autres Autochtones avaient porté l’uniforme. Certains se sont enrôlés dans la Marine royale du Canada et l’Aviation royale du Canada, mais la plupart ont servi dans l’Armée canadienne.
Les soldats autochtones ont encore une fois servi en tant que tireurs d’élite et éclaireurs, tout comme ils l’avaient fait au cours de la Première Guerre mondiale, mais certains ont également joué un rôle spécifique durant ce conflit. Un exemple unique était le fait d’agir à titre de « transmetteur en code ». Des hommes, comme Charles Checker Tompkins de l’Alberta, ont traduit en langue crie des messages radio confidentiels afin qu’ils ne puissent pas être compris lorsqu’ils étaient interceptés par l’ennemi. Un autre « transmetteur en code » d’origine crie traduisait alors en anglais le message reçu pour qu’il puisse être compris des destinataires visés.
Les soldats autochtones ont été décorés de nombreuses médailles de bravoure pendant la guerre. Willard Bolduc, un aviateur Ojibwa de l’Ontario, s’est vu décerner la Croix du service distingué dans l’Aviation pour ses combats comme mitrailleur de bord durant une série de bombardements sur le territoire européen occupé. Huron Brant, un Mohawk de l’Ontario, a obtenu la Médaille militaire pour son courage lors des combats en Sicile.
Les peuples autochtones ont également contribué à l’effort de guerre sur le front intérieur. Ils ont fait des dons financiers importants, en plus de donner des vêtements et des aliments pour appuyer de bonnes causes. Ils ont également accordé le droit d’utilisation de certaines terres sur leurs réserves pour permettre la construction de nouveaux aéroports, de champs de tir et d’installations de la Défense. Les efforts particuliers des communautés des Premières Nations en Ontario, au Manitoba et en Colombie-Britannique ont même été reconnus avec l’attribution de la Médaille de l’Empire britannique afin de rendre hommage à leurs généreuses contributions.
Guerre de Corée
La guerre de Corée a éclaté en Extrême-Orient en 1950, et plusieurs centaines d’Autochtones ont porté l’uniforme du Canada au cours de ce conflit. Beaucoup d’entre eux avaient combattu pendant la Seconde Guerre mondiale, qui avait pris fin cinq ans plus tôt. Ce retour au service en Corée a vu certains de ces braves soldats pratiquer leurs fonctions antérieures de différentes façons.
Tommy Prince, un Ojibwa du Manitoba, a été en service avec le Princess Patricia’s Canadian Light Infantry en Corée. Il a utilisé sa vaste expérience de fantassin acquise pendant la Seconde Guerre mondiale pour réaliser des missions périlleuses, comme celles de type « patrouille d’enlèvement ». Alors qu’il était commandant en second d’un peloton de fusiliers, il a dirigé un groupe d’hommes dans un camp ennemi où ils se sont emparés de deux mitrailleuses. Il a également pris part à l’âpre bataille de Kapyong en 1951, et son bataillon s’est vu décerner la décoration United States Presidential Unit Citation – un rare honneur pour une force non américaine.
Années d'après-guerre
Les hommes et les femmes autochtones ont aussi continué de porter fièrement l’uniforme dans les années d’après-guerre. Comme beaucoup de ceux qui ont poursuivi leur vie dans les forces armées, ils ont été déployés partout où l’on a eu besoin d’eux – de leurs fonctions auprès de l’OTAN en Europe pendant la guerre froide à leur service auprès des Nations Unies, en passant par leur participation à d’autres opérations multinationales de soutien de la paix dans des dizaines de pays partout dans le monde. Au cours des dernières années, de 2001 à 2014, de nombreux membres autochtones des Forces armées canadiennes ont dû accomplir des missions dangereuses en Afghanistan durant les efforts militaires de notre pays dans ce territoire déchiré par la guerre.
Plus près de chez nous, le personnel militaire autochtone a joué une grande variété de rôles, notamment celui des Rangers canadiens. Ce groupe de réservistes est actif principalement dans le Nord, ainsi que dans les étendues éloignées de nos côtes Est et Ouest. Les Rangers utilisent leur connaissance particulière du territoire pour aider à maintenir une présence militaire dans ces régions difficiles à atteindre, surveiller les littoraux et prêter assistance dans les opérations de sauvetage.
Héritage
L’histoire de la contribution des Autochtones à la Première Guerre mondiale, à la Seconde Guerre mondiale, à la guerre de Corée et aux opérations en temps de paix des Forces armées canadiennes est une histoire glorieuse. Bien qu’il soit difficile de fournir des chiffres exacts, on estime que près de 12 000 Autochtones des Premières Nations, Métis et Inuits ont servi durant les grands conflits du 20e siècle et que, malheureusement, au moins 500 d’entre eux ont perdu la vie lors de ces guerres.
Ce riche héritage a été reconnu de plusieurs façons. Les noms donnés à des navires de la Marine royale canadienne au fil des ans, comme le NCSM Iroquois, le Cayuga et le Huron, ne sont qu’une indication de notre respect pour la contribution durable des peuples autochtones. Cette longue tradition de service militaire est également commémorée avec le remarquable Monument national érigé en l’honneur des anciens combattants autochtones à Ottawa. Ce monument commémoratif est profondément symbolique et présente un grand aigle de bronze à son sommet, avec quatre hommes et femmes de différents groupes autochtones de partout au Canada immédiatement sous ce dernier. Un loup, un ours, un bison et un caribou – ces puissants animaux qui représentent des « guides spirituels » qui ont longtemps été considérés par les cultures autochtones comme importants pour connaître le succès sur le plan militaire – montent la garde à chaque coin. Des cérémonies du souvenir sont tenues près de ce monument spécial, y compris au cours de la Journée des vétérans autochtones qui est célébrée le 8 novembre de chaque année.
Le Canada se souvient
Le programme Le Canada se souvient d’Anciens Combattants Canada incite tous les Canadiens et les Canadiennes à se renseigner sur les sacrifices et les réalisations de tous ceux et celles qui ont servi et continuent servir leur pays en temps de guerre et de paix. Il invite aussi les citoyens à prendre part aux activités commémoratives qui aident à préserver l’héritage qu’ils nous ont légué et à le transmettre aux générations à venir.
Anciens Combattants Canada reconnaît la contribution de Fred Gaffen, dont les recherches ont été utiles pour l’écriture de cette publication.
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