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Le soldat et la peur

La force francophone

Le soldat et la peur

LE SOLDAT ET LA PEUR J'me rappelle un matin, moi, y avait un officier d'Edmundston et puis, son runner, c'était un gars d'Edmundston aussi, un gros homme, à peu près la grosseur à lui, là, et puis c't'homme-là, y braillait comme un enfant pour pas aller dans l'attaque, pis tu pouvais pas r'fuser, hein ? Ça fait qu'j'ai dit : « J'irai, moi... J'irai runner, à sa place... » Mais, y avait pas besoin d'faire ça, l'officier connaissait l'gars, pis c'tait un bon gars, pis tout' ça, mais y était épeuré à mort. Fait qu'c'est moi qui a été runner pour lui c'te journée-là... .Tu t'mets là à écouter des canons, pis des bombes, pis des Moaning Minnies et pis les rockets qui t'passent au-d'ssus d'la tête. Tu peux juste prendre ça pour une telle secousse, là. J'trouvais ça dur, moi, su' l'champ d'bataille, certain, parc'que j'avais pas la grosseur, j'avais pas l'poids, j'avais pas le... comment c'que j'dirais ça... la capacité qu'un gars qui pèse cent-cinquante ou deux-cents livres. Tu peux pas y être le même... Tu peux prendre un p'tit ch'val, pis tu peux faire un gros lot d'ouvrage avec, mais tu peux pas remplacer l'gros ch'val. Quand on était là, là, c'est pareil comme, des fois, on rencontre du monde, pis : « Ah ! ben, mon père était dans l'armée... Mon père était overseas... » – « Mais, où c'qu'y était ton père ? Quel régiment qu'y était d'dans ? Quand est-ce que c'est qu'y a été ? Où est-ce qu'y s'est fait blesser ? » T'aurais pu v'nir joindre notr' régiment, à soir, toi, pis d'main matin, j'aurais r'gardé pour toi, pis t'aurais p'us été là, hein ? Si y aurait eu une bombe qui aurait eu tombée su' ton tranchée, où est-ce que c'est qu't'étais, ou une balle qui t'aurait eu pogné, t'étais p'us là l'lend'main matin. T'étais parti à l'hôpital, ou parti en que'que part ailleurs...

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