Je suis entré à fond dans ma réadaptation
Des héros se racontent
Transcription
Là c’est ça, dans le fond, tu te réveilles
et tu te rends compte que tu viens de fesser un mur.
La journée d’avant, deux jours avant,
t’avais tes deux jambes, tu faisais ce que tu voulais.
Tu pouvais aller jouer au hockey,
tu pouvais aller partir dans le bois, tu pouvais…
J’avais plein d’options, et puis là je me retrouve dans une situation
dans laquelle j’ai aucune idée ce que je vais faire,
dans le sens que je connais personne qui a eu un accident comme ça.
Je ne connais aucun amputé,
je ne sais même pas c’est quoi être amputé, c’est quoi une prothèse.
Tu te retrouves vraiment devant un mur
où est-ce que c’est de l’inconnu à 100%.
Je suis resté 10 jours à l’hôpital, si je me rappelle bien,
le temps que je sois stable suite aux opérations.
Quand je suis rentré à la maison, mon premier réflexe a été
d’aller sur Internet voir ce qui se faisait, c’est quoi un amputé,
comment ça fonctionne, peux-tu faire des sports?
Là j’ai vu plein de choses incroyables.
Des gens qui couraient, des gens qui jouaient au hockey,
qui faisaient du ski, je regardais un peu toutes les choses
que je faisais moi comme personne avec deux jambes,
pour voir si je serais capable de le refaire un jour.
Je voyais des choses vraiment incroyables et je me suis dit,
eux autres sont capables de faire ça, moi itou je vais être capable.
J’ai comme eu un regain d’énergie
après ces 10 jours passés à l’hôpital, et puis je suis entré à fond,
à 100% dans ma réadaptation.
Je pense qu’à ce moment-là, je vivais dans le déni,
justement par rapport au fait que
tu te dis ça va être pas si pire que ça, c’est pas grave.
Le temps passe, tu vas en réadaptation.
À ce moment-là j’étais à Québec,
au centre de réadaptation à François-Charron.
Je ne pouvais pas faire grand-chose.
Ma plaie était pas encore fermée,
j’étais pas encore guéri complètement,
je faisais des petits exercices assez relaxe jusqu’à ce que je puisse,
après deux mois, avoir ma première prothèse.
Et puis, je pense que c’était début janvier,
où j’ai pu faire mes premiers pas.
Mes premiers pas, c’était entre deux barres latérales.
Là tu te rends compte que ce que j’ai vu sur Internet,
ce ne sera peut-être pas si facile que ça.
Moi je m’étais imaginé partir à courir avec ma prothèse.
Là tu te rends compte que c’est vraiment pas confortable,
ça fait mal, c’est lourd.
T’es pas capable de te tenir en équilibre,
t’es pas capable de mettre 100% de ton poids de corps sur ta jambe.
Là, tu pognes un gros « down ».
Tu vois les gens qui sont autours de toi,
la clientèle à ce centre de réadaptation,
c’est vraiment plus des gens qui eux, sont diabétiques, donc qui
ont des problèmes de santé un peu plus graves, des gens plus âgés.
Tu essaies de trouver un peu de réconfort
à travers ces gens-là, que tu trouves pas d’ailleurs,
parce que c’est des gens qui sont plus âgés.
Tu pourrais t’imaginer, ce gars ça fait deux mois
qu’il s’entraine avec sa prothèse, mais il est juste rendu là.
Tu fais comme, qu’est-ce qui va se passer?
Finalement, ça a quand même bien été.
Les spécialistes avec qui j’ai travaillé dans ma réadaptation
étaient super, on a fait 1 pas à la fois et j’ai réussi à
être capable de marcher 100 mètres, 200 mètres, 300 mètres.
Ça va bien une semaine, puis après ça, ça va pas bien du tout.
Dans le sens que tu n’es plus capable de faire ce
que tu étais capable de faire la journée d’avant.
Tu te retrouves avec des problèmes de peau à cause de ta prothèse,
tu fais comme, ça va tu tout le temps être comme ça?
C’est un petit « down : et là il y a un autre « up ».
Tu es capable de recommencer à marcher comme il faut.
Tu progresses là-dedans, mais c’est toujours des « up and down ».
Jusqu’à ce qu’un jour, tu te stabilises un petit peu là-dedans
et ton moignon, ta jambe amputée se renforcit.
Là, tu es capable de faire plus de choses
sans avoir d’impact la journée d’après.
Si je marchais la veille, mettons 1 kilomètre, le lendemain,
j’étais plus capable de rien faire du tout.
Plus tu progresses dans ta réadaptation,
plus tu es capable d’en faire.
C’est un petit peu plate à dire,
mais c’est de continuer malgré la douleur pour pouvoir
pousser tes limites, même si ça fait mal, fallait que tu continues.
Parce ce que si tu pousses pas ta limite,
tu ne pourras jamais être capable d’aller plus haut.
C’est un petit peu un jeu de douleur, mais au final, ça paye,
parce qu’aujourd’hui, je suis capable de vivre normalement
par rapport à mon amputation, du moins, presque normalement.
Description
M. Lehoux décrit les journées et semaines qui ont suivi son amputation, les moments inspirants et les jours plus difficiles. Il parle de l’importance de repousser ses limites malgré la douleur.
Antoine Lehoux
Monsieur Lehoux est né en 1993 à Thetford Mines, au Québec. Dès son tout jeune âge, il écoutait des films sur l’armée et était inspiré par les valeurs militaires. Il s’est enrôlé à 16 ans et rêvait de faire carrière dans les Forces armées canadiennes. En raison de son jeune âge, M. Lehoux s’est d’abord entrainé comme réserviste, poursuivant ses études. Un grave accident lors du jour du Souvenir en 2013 l’a contraint à quitter les Forces armées canadiennes après 5 années de service.
Catégories
- Médium :
- Vidéo
- Propriétaire :
- Anciens Combattants Canada
- Date d’enregistrement :
- 5 décembre 2017
- Durée :
- 5:19
- Personne interviewée :
- Antoine Lehoux
- Guerre ou mission :
- Forces armées canadiennes
- Emplacement géographique :
- Canada
- Branche :
- Armée
- Unité ou navire :
- Régiment de la Chaudière
- Grade militaire :
- Soldat
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- Date de modification :