C'EST DÉCIDÉ, JE M'ENRÔLE !
Un beau dimanche, ben j'étais restée à la maison, mes parents étaient sortis,
pis quand y sont r'venus, j'tais en train d'tricoter. Pis dans c'temps-là,
fallait pas tricoter l'dimanche... On travaillait pas le dimanche, c'était péché.
Fait qu'ma mère, elle dit : « Ça a pas d'bon sens d'travailler l'dimanche.
Pis c'est péché, pis... » Là, j'étais déçue, pis j'suis montée dans
ma chambre. Mon mon frère, y dit : « Ça va pas ? » J'ai dit : « Non... »
J'ai dit : « J'ai envie d'rentrer dans l'armée. » Y dit : « Vas-y, tu
vas aimer ça. » [rires] Fait qu'ça a pas rentré dans l'oreille d'un sourd.
Le lend'main, j'ai été m'enregistrer, pis j'ai été... J'ai rentré avec les CWAC, pis on m'a...
Au bout d'une semaine, j'étais partie, j'étais rendue à Kitchener, en Ontario.
Pis quand qu'vous dites, dans c'temps-là, y avait pas d'autos...
presque pas d'autos... y avait pas d'autobus, pas d'avions.
On voyageait par train seulement. Et, ça fait que on changeait à Montréal,
pis on changeait, après ça, à Toronto avant d'se rendre à Kitchener.
Pis ça, c'était des huttes en rangs d'planches, pas chauffées, avec un poêle
dans l'milieu, pas d'eau chaude [rires]. Puis, bon, on a aimé ça.
Moi... on était six Canadiennes françaises et puis le reste,
c'était toutes dans Anglaises. Y avait un régiment de [inaudible],
d'la Grande-Bretagne, qui était v'nu s'entraîner parc'qu'y pouvaient
p'us les entraîner en Angleterre. C'tait trop bombardé.
VOUS SAVIEZ PARLER ANGLAIS ?
Heureusement, j'avais suivi des cours d'anglais, ici à Québec,
avec ma tante le soir, t'sais, on allait... On avait le rudiment,
quoi, on s'comprenait. On a gradué, pis après ça
on m'a d'mandé à quelle place que j'voulais aller. Ben, j'ai dit :
« J'aim'rais retourner moins loin qu'possible, là... » Y ont dit :
« Nous autres, on voulait t'envoyer à Vancouver. » Y ont dit :
« T'aurais été comme secrétaire, pis en plus, après ça, t'aurais été
en Angleterre... » Fait que j'ai dit : « Si vous avez une place plus vers le Québec
j'préfèrerais... » Fait qu'là, y m'ont dit : « Tu peux pas aller à Québec,
mais on va t'envoyer à Montréal, dans les entrepôts d'matériel militaire. »
Puis y avait un... toutes les pièces rares, pendant la guerre
les choses qu'on pouvait pas avoir, comme les lampes de radio,
des clous, des vis, des marteaux, des pinces... Ben ça, c'était dans une cage
gardée par un militaire armé, dans une grande entrepôt, pis y avait
rien qu'moi qui avait l'droit d'rentrer là, aller chercher l'matériel, l'apporter.
Là, ça s'en allait à l'emballage, c'était emballé pièce par pièce,
mis dans des boites, env'loppé dans d'la jute, saucé dans d'la cire pour
que si c'était... le bateau était coulé, ça n'soit pas perdu.
Fait qu'c'était... ça prenait beaucoup d'monde pour faire tout' ces ouvrages-là.
Puis, un moment donné, y ont eu une grosse fête et puis y avait des brigadiers
pis y ont d'mandé... sont v'nus... y m'ont d'mandé si j'voulais aller pour servir
parc'qu'on était toutes d'la même grandeur, pis j'ai accepté, j'ai aimé ça.
C'tait très protocolaire, pis des grandes cérémonies [rires].