Cryptographie à Halifax
Halifax, le problème était les barracks de nouveau parce que tout, tout commençait.
Alors les bâtiments étaient faits, chaque dortoir, nous étions cent filles par dortoir
et il y en avait quatre, on était quatre cents. Avec, au milieu
étaient les douches, les lavabos, il y en avait, je sais plus, vingt-cinq, trente, c’était immense
tout ça, et partout, dans ces bâtiments-là, les gens travaillaient sur des quarts.
C'est-à-dire, jamais une semaine de neuf heures à cinq heures, ça n’existait pas.
Donc on travaillait la nuit, le jour, le dimanche, on avait un dimanche par mois.
Et on gagnait quatre-vingt-dix cents par jour. C’était notre salaire.
On rentre, on signe, on va dans le vestiaire, on s’installe.
Souvent, on prend en route un message qui est déjà commencé d’être codé
parce que bon, quand ça s’arrête, le message, lui,
a une page, deux pages, trois pages à faire et on le fait toujours à deux.
Ça se fait toujours à deux. Une regarde dans, disons dans le dictionnaire,
montrer ça dans le dictionnaire, et l’autre, dans ce dictionnaire-là et disons
que il y a des chiffres, bon, je dis : « je serai à Halifax tel jour », parce qu’il y en a
que c’est des bouts de phrases et ça ne fait que quatre chiffres pour faire des
économies aussi, il y a des choses qui se répètent souvent.
Donc on a que le mot Halifax de (inaudible) de Québec ou de New York, enfin…
Et ça, c’est mis dans un cahier, dans un cahier et c’est,
c’est un travail, là, de nouveau parce et tout doit être vérifié deux fois,
deux fois. Et là, une fois que c’est fait, ces feuilles-là partent
dans la chambre des… on est, on est pas beaucoup par pièce,
mais c’est pas des petits, des petits coins de rien du tout, là,
ce sont des pièces assez importantes, parce qu’à l’époque il y avait
de la place, et puis… faut le silence, faut pas que d’autres parlent
en même temps que nous. C’est pas qu’il y a le secret,
on est tous dans le même bain mais on, on parle, on lit, on soustrait,
on fait ceci, on fait cela, donc ça se fait à deux. Moi je ne me souviens pas,
je me trouve que, je me trouve dans une pièce seule quand je fais ça. Dans la
chambre des teletype, là c’était vingt, vingt-cinq machines qui travaillaient nuit et jour.
On se spécialisait toujours en plus. Des nouveaux codes sortaient, des nouvelles
machines sortaient. Je suis retournée à St-Hyacinthe pour prendre un cours spécialisé.
Là, nous avions des teletype qui sortaient pas le ruban comme Western Union faisait
avec comme Halifax en clair ou codé, mais sur des petits rubans de papier. Là c’était un
ruban qui… Vous tapiez le texte, dans la machine il était comme on dit scrambled,
il était mélangé et il sortait sur une bande de papier d’à peu près un pouce
de large qui était perforée. Et chaque perforation était une lettre ou un chiffre.
Et bien, vous savez, au bout de, je pourrais pas dire combien de temps,
mais peu de temps, je lisais ça comme je lisais un livre.
Aussi rapide… fallait être très rapide.
Et une fois que vous l’aviez chiffré, par exemple,
pour envoyer à Washington, vous le mettiez sur une machine qui part à
Washington si vous vouliez aller à Londres, ça partait sur une autre machine.
Mais vous aviez pas à répéter chaque fois le texte.
Il est tapé une fois. La seule chose, c’était l’indicatif parce que
si vous, vous partez à Toronto, et que en chemin il y a du danger
entre vous et moi nous avons un code. C’était en danger. Et il y a que vous
et moi qui savons, je vous envoie un message, pour que vous le décodiez
pour vous dire : « passez pas par telle route, prenez une autre route. »
Donc, chacun avait un indicateur de, qui changeait tout le temps d’ailleurs.
Tout le monde le sait ça. Fallait pas donner la chance aux ennemis de,
de nous couper, de couper notre code, de trouver notre code.