EN ROUTE VERS L'ITALIE (PARTIE 3)
Notre hôpital déménageait tout l'temps. Après... plus... quand les troupes avançaient,
nous aussi on avançait. Et puis, un hôpital nous dépassait et nous on
l'dépassait ensuite pour qu'y ait toujours un hôpital qui reste en arrière,
pis un hôpital qui allait d'l'avant pour rejoindre les troupes.
Et... ça été bien... ça été dur. C'était... le climat. D'abord, au mois
d'novembre, quand nous sommes arrivés, la première fois, on a eu... y faisait froid,
on a eu beaucoup d'pluie, on était pas installés. Mais, après ça, avec le temps, on a été
bien occupés... bien occupés avec nos blessés. Et on a toujours continué comme ça...
Ça c'est bien passé. On a eu d'l'ouvrage tout l'temps, mais on était un bon groupe.
Le même groupe est resté... Ils en ont retourné. Ça va vous faire rire, mais ils
ont retourné les personnes qui avaient en haut d'quarante ans parc'qu'elles étaient
trop vieilles. Le stress est terrible, hein ? Ils ont retourné des infirmières, celles qui
avaient en haut d'quarante ans, puis du personnel parc'que, après le torpillage,
qui avait déjà été une épreuve, on avait pas d'équip'ment pour opérer...
On était logés, pis on avait pas d'vêtements, on a vécu dans des conditions
plus difficiles et puis, ensuite, c'est pas facile voir arriver des
blessés, là-bas, hein ? On r'cevait beaucoup de brûlés qui avaient brûlé
dans des tanks. Ça, c'est terriblement dur. On r'cevait des...
Pis, y en a une coupl'... notr' directrice, j'pense, qui est r'tournée, pis on a eu quelques
personnes qui on fait... comme des burn-out, vous savez. Mais on s'attend à ça.
C'est vraiment pénible d'les voir arriver. Par contre, on voit d'autres choses de bien.
J'ai r'çu, moi, des gros blessés avec une gourde d'un Allemand. J'en ai r'çu
un autre, une fois, un brûlé qui avait le paletot d'un Allemand sur le dos.
Vous savez, on voit que ce sont des soldats, qui servent
un pays ou un autre, c'est un soldat qui r'connaît un autre soldat.
Ça, ça nous touchait beaucoup. On a eu beaucoup d'blessés...
On a eu des brûlés, des... beaucoup d'blessés. On en a évacué...
Dans le plus gros d'la bataille, on avait évacué 1 500 patients dans cinq jours.
C'est formidable, hein ? Le restant, moi... les statistiques, j'suis pas très bonne.
J'peux pas vous dire combien y a eu d'blessés à c'moment-là, combien on en recevait.
C'qu'on avait l'plus peur, on avait peur des SS troups qui parachutaient en
arrière de nos lignes. Vous dire qu'avoir peur, là... on avait peur. Les gens qui
vont à la guerre, qui ont pas peur, j'en connais pas. Nous, on en riait,
vous savez, mais on s'disait toujours... On avait peur de sortir d'une hutte
pour aller dans une autr' hutte, pis quand y avait des [inaudible],
pis, évidemment, les alliés passaient au-d'ssus d'nous pour aller attaquer,
pis les autres passaient aussi... Mais, les avions nous faisaient très, très peur
et puis on avait peur même... les déplacements dans l'hôpital, dans nos huttes,
où nous étions, on aimait pas ça non plus. On s'déplaçait pas facilement.
Pis toujours à la noirceur, hein ? On a pas d'lumière...
On vit dans l'black-out tout l'temps. Ça, c'est pas facile. On a continué la campagne
comme ça jusqu'à la fin d'la guerre. Et puis on est r'partis... on a quitté
l'Italie quand les troupes, tout l'monde était rendu presqu'en Allemagne.
C'tait presque la fin.