Douze mois au Labrador
On a sortis en mer, puis personne savait trop où on allait. Puis, on n’avait pas…
pas de carte, puis on n’avait aucune notion de… On était dans les cales du bateau.
Ben finalement, quelqu’un, quand on est arrivé alentour de Terre-Neuve,
il y a quelqu’un qui a dit : « on est rendus à Terre-Neuve! » Puis là, ils nous ont dit :
« on va à Goose Bay, au Labrador ». C’était en 1942, ça fait soixante-trois ans de ça.
Ils nous emmenaient là en forêt avec, dans des tentes. Il y avait à peu près une
centaine d’hommes qui travaillaient là pour la compagnie Mc Namara qui avait construit
une piste d’atterrissage pour des avions qui étaient pas tellement longue,
parce qu’aujourd’hui c’est une des plus grandes aéroports au monde, ça, à Goose Bay.
Puis, ils avaient construit des hangars pour placer de la nourriture pour les travaillants qui étaient là,
puis pour les soldats qui arrivaient là. Nous autres, on arrivait là. Puis, ils avaient construit quelques
bâtiments pour les officiers de l’armée. Mais nous autres, les soldats, on était tout dans le bois,
un peu partout, en forêt, des tentes, des tentes cloche, bell tent, on était quatre par tente.
Ça fait que là, on avait aucune facilité, il y avait pas d’électricité, il y avait pas d’eau courante,
il y avait pas de toilette,fallait vivre comme ça, là, on courait… Puis nous autres on servait,
je me demande pourquoi ils nous avaient amené là. On savait qu’il y avait beaucoup de sous-marins
dans le détroit de Belle Isle, on entendait dire qu’il y avait beaucoup de sous-marins là.
En même temps, ils nous faisaient faire la garde à l’aéroport. Chacun deux heures. Ça pouvait être
la nuit, ça pouvait être n’importe quel temps. Puis on faisait la garde à une tour de contrôle
qui était pas loin de Happy Valley. Happy Valley, ça c’était, il y avait beaucoup d’Indiens là.
Puis, il y avait des blancs aussi, mais on n’avait pas le droit d’aller là,
nous autres. Mais on allait là, ils nous emmenaient là faire la garde. C’était jour et nuit,
c’était gardé, ça. Puis on allait là, c’était l’hiver comme l’été. Puis là, l’été avançait,on était
au mois de septembre puis on était encore dans des tentes avec pas plus de facilités que ça.
À un moment donné, l’armée est venue, puis j’ai, j’ai des documents pour supporter ça,
ils nous ont dit fallait creuser parce que là, fallait s’organiser pour passer l’hiver. On pouvait
pas revenir. Ils nous avaient dit que peut-être après six mois qu’ils pourraient nous
transporter par avion. Mais il y en quelques uns apparemment qui avaient sorti,
mais moi je les ai pas vus. Mais ils ont pas pu les ramener
par les tempêtes, puis c’était une grosse hiver de neige.
Ça fait qu’au mois d’octobre, il a fallu creuser. On s’est fait des trous dans la terre,
parce que ça, le plateau, c’est tout du sable, ça Goose Bay. Il y a cent
pieds de sable d’épais. Fait qu’on a creusé là-dedans, puis ils nous faisaient haller les rebuts du
sciage dans les moulins à scie qu’il y avait là pour faire de la construction. Puis on retenait les
murs de ça avec de la slab, des rebuts de bois puis on s’avait fait un toit, puis on a mis du papier
noir là-dessus. Mais on n’avait pas de poêle. On s’était fait, s’était fabriqué un poêle avec des,
des barils de gaz de quarante-cinq gallons, parce que, souvent, on débarquait du bateau, ils se servaient
des soldats pour débarquer les bateaux qui arrivaient là avec de la nourriture, avec du gaz pour servir
tous les travaillants qu’il y avait là, la compagnie Mc Namara qui avait des hommes. Puis ils avaient
des camions, puis ils avaient des tracteurs. Ils étaient après, ils étaient après faire de la construction parce
qu’il y avait beaucoup d’hommes. On était là après. Mais pour nous autres, soldats, c’était notre travail,
d’embarquer ça, puis amener des bateaux de bière. On avait droit à une bière par semaine.
On faisait une parade le samedi, puis on pouvait avoir une bière pour vingt-cinq cents. Mais de là
il a fallu creuser, puis il a fallu se faire des, des poêles avec des barils d’huile, puis pour
des tuyaux, c’était pareil. On a pris tout des can, des can de, de conserves qu’on défaisait
puis qu’on mettait un après l’autre pour se faire un tuyau. Puis, on charroyait du bois,
il y avait une place où ils sciaient du bois pour faire charroyer du bois pour chauffer.
Mais encore là, on n’avait pas d’électricité, pas d’eau courante, fallait casser la
glace sur les, les barils dehors lorsque, le matin, pour se laver un petit peu.
Quand c’était le temps de prendre des bains, c’était toute une histoire fallait faire fondre la neige,
faire des feux pour faire fondre la neige pour de la neige pour faire un
peu d’eau, pour essayer de se laver un peu. On a passé l’hiver comme ça,
dans un trou dans la terre. On était sept, on était sept, huit par trou.
En tout cas… Durant l’hiver, ils nous ont, ils nous ont donné des raquettes,
puis des skis de fond, puis quatre ou cinq fois durant l’hiver, on faisait des marches
avec de la raquette, puis ils nous apprenaient à faire de la raquette, puis du ski
de fond pour un peu de divertissement, parce qu’il y avait, à part de, à part de garder
puis de chauffer les poêles, fallait chauffer les poêles de tous les grands
hangars qui étaient pleins de nourriture. C’est les soldats, fallait qu’ils
chauffent les poêles. Ça fait qu’on avait chacun notre, on avait chacun notre journée,
nos heures. Puis, on pouvait passer une nuit. C’était mon tour d’aller
chauffer les, les les… puis il y en avait plusieurs parce qu’il y avait toute
la nourriture pour les, les employés de la Mc Namara, puis les soldats
du New-Brunswick Rangers qui étaient là. Mais on a seulement pu
partir de là dans le mois d’août l’année d’après, on avait été douze
mois, là. Ça fait qu’on avait trouvé l’hiver long en, en titi…