Hollande, cimetières et pauvreté
À Grossbeek, tu peut marcher en Allemagne, là, c’est tout près,
ben il y a un cimetière canadien là. Il y a 2300 Canadiens
qui sont morts là. C’est tout des jeunes hommes qui sont morts disons…
du mois, du mois d’avril, aller jusqu’au cinq de mai. Un mois avant la fin de la guerre, oui.
Ah oui, ça c’est… Puis tu vas là ben, tu passes les tombes, puis c’est dix-neuf ans,
vingt-deux ans, vingt-quatre ans, vingt-deux ans, vingt-trois ans… Il y avait beaucoup,
il y avait beaucoup, c’est la, c’est la Croix-rouge qui ramassait les cadavres.
Puis on s’adonnait à passer là, puis il y avait des civils, tous des Français, en Normandie,
ils ramassaient tous les gens qui étaient là, qui creusaient des fosses. À part ça,
c’était terrible, il y avait pas de cimetière central. Une fosse à peu près comme ça de haut.
C’est sûr qu’il y avait personne qui se promenait avec des cercueils,
puis il y avait pas, il y avait pas de cérémonie à… c’était roulé dans une couverte,
puis ce qu’on avait dans le cou, on avait un, on appelait ça un dog tag,
avec un numéro. Moi, le mien c’était G63028. Ils pouvaient nous
identifier par notre numéro. Parce qu’on, on avait pas le droit de porter rien
sur nous autres pour nous identifier. Ça c’était bien, c’est un règlement sévère de l’armée.
Aucun document, puis si on était pris prisonnier, on devait jamais dévoiler
autre chose que notre, notre, notre rang et notre régiment.
Oui, on n’avait pas le droit de divulguer rien, puis on avait aucun document
sur nous autres pour dire que tu sais, qu’on appartenait
à un certain régiment, un certain groupe.
Des cadavres allemands sur le chemin…
Mais les Allemands, eux autres, ils avaient pas toujours la chance de venir les ramasser.
Il en restait, puis c’était au soleil, le mois de juillet. C’était pas beau à voir,
je te le dis, moi! Mais là, en Belgique, quand ils se sont vus pris, les Allemands,
ils déménageaient avec des, ils prenaient tous les chevaux de la Belgique, les chevaux belges.
Il y avait des chevaux, c’était de toute beauté, ils les attelaient tous, c’était tout sur des carrioles.
Puis ils mettaient leur équipement là-dedans pis de l’ammunition, puis ils déménageaient avec ça,
puis là les, les avions Allemands, euh, alliés venaient, puis ils les bombardaient,
puis les chevaux c’était pilé sur les chemins, on savait plus où passer.
C’était un moyen dégât, je va te dire, même en Allemagne! Pour les civils,
je me rappelle quand on arrivait pas loin de Caen, ils ont
envoyé des avions, puis ils ont laissé tomber des petits papiers.
On ramassait ça, ils disaient aux Français de, de sortir de Caen, tout de sortir de Caen
parce que ça allait être bombardé. Puis, il y en a ben qui en avaient pas trouvé ou qui
voulaient pas. Ben quand ils ont bombardé Caen, il y en a seize mille Français
qui se sont fait tuer là. Oui. Nous autres, on était là-dedans le soir,
quand ça a été bombardé, c’était tout défait.
Puis, ils nous faisaient passer, on était quatre, cinq par côté de rue,
on marchait en zigzag pour pas qu’ils nous tirent tout d’un coup,
avec des visages noircis, puis… On passait les bâtisses pour être certains
qu’il restait pas d’Allemands là-dedans. C’était de même que ça roulait.
Ah oui, c’était, c’était… en Allemagne pareil… les civils, c’était bombardé puis ça sortait.
Puis des femmes avec des familles c’était dans des caves, les trous
dans les champs. Il y a des femmes qui avaient des enfants dans les champs.
Mais ça, avec rien à manger ! Ils ont souffert eux autres aussi. Mais, il y avait rien qu’on
pouvait faire, nous autres, c’était de sortir le plus vite, puis, qu’est-ce que tu veux…
on a rentré, une fois on a rentré dans une grange qu’il y avait là. Il y avait, il y avait une dizaine de lits.
Il y avait tout des femmes allemandes qui étaient couchées. Les malades, c’était tout là.
Nous autres on les a pas touchées, bien sûr! On a regardé ça.
On s’est assurés qu’il y avait personne d’armé, puis on les a laissées là.
Ah oui, à mesure qu’on avançait, tu voyais ressortir, des fois c’était comme
comique parce qu’on voyait des, ils étaient dans des caves puis les petits
enfants sortaient, des petits enfants grands de même avec les mains en l’air,
avec un petit papier en blanc pour dire : « on se donne! », tsé…