Les premiers à laisser, c’était les gens qui étaient blessés,
les gens qui avaient été prisonniers.
Alors, tous les bateaux ont pris ces gens-là pour commencer.
Puis, nous autres, on nous a fait faire autre chose.
On allait chercher les prisonniers en Allemagne,
en Belgique, en France, partout, tu sais, pour les ramener,
pour les préparer pour les bateaux.
Intervieweuse : Les prisonniers canadiens ou les Alliés?
Tous les Canadiens. Bien, pas... Royal Canadian Air Force.
Là là, ces gens-là, on allait les chercher.
Intervieweuse : Après la fin de la guerre?
Après la fin de la guerre. Puis là, après ça,
ça a été mon tour de prendre le bateau pour revenir.
Et là je suis revenu avec le bateau,
ça s’appelait le Louis Pasteur.
Le bateau était tellement petit que c’était épouvantable,
puis ils mettent tant de gens là-dedans.
Ça barouettait cette affaire-là, c’est pas possible.
On se pensait dans une chaloupe, ça ne se peut pas,
après avoir été avec le Queen Mary pour traverser.
Le Louis Pasteur, ça nous a pris sept jours pour traverser
l’océan. C’est long à se faire barouetter.
Surtout pour des gens qui ont travaillé dans les airs, ah non.
Puis là, on prenait le train pour revenir à Montréal.
Intervieweuse : Quand vous êtes arrivé à Halifax?
Oui, on est arrivés à Halifax,
puis là on est revenus à Montréal dans le train.
Et je peux vous dire que quand on est partis dans le train,
on s’est fait payer des cokes puis des affaires de même tout
le long. Les gens étaient généreux. On est revenus,
c’est comme s’il n’avait pas eu de guerre, tu sais.
Y’avait pas personne. Y’avait pas de guerre,
puis personne n’était aux stations pour attendre les gens.
Et je peux vous dire que j’ai été un peu désappointé.
Quand je suis parti, mes confrères de classe sont tous venus
faire un party. « Paul s’en allait à la guerre puis... »,
j’étais habillé en uniforme puis, en tout cas, un beau party.
Je reviens de la guerre, je m’imagine qu’il va avoir un
party. Je ne dis pas ça parce que je suis meilleur qu’un autre.
Je dis, ah, ils vont probablement me faire un maudit party.
C’est pas sûr ça. Il y avait ma soeur
unique qui était à la gare.
Intervieweuse : Qui vous attendait?
Parce que vous êtes revenu tard, vous.
Je suis revenu tard, je suis revenu tard,
tellement tard que quand on est revenus là,
on ne voyait personne en uniforme.
Il n’y avait personne en uniforme.
Moi, je suis en uniforme, j’ai l’air fin moi là en uniforme.
On me prenait pour un taxi driver. Mais, ils savent pas,
la guerre... mais, tu sais, ça fait une drôle d’impression.
Alors, tu sais, tu te sens mal à l’aise.
Ça dure pas longtemps parce que t’es revenu au pays.