Compte rendu des discussions – 22 mars 2017

Mercredi 22 mars 2017
De 8 h à 15 h 45 (HAE)
Hôtel Lord Elgin – Salle Lady Elgin (étage de la réception)
100, rue Elgin, Ottawa (Ontario) K1P 5K8

Présents

  • Sapeur (retraité) Aaron Bedard
  • Michael Blais, Groupe de défense des intérêts des anciens combattants
  • Dre Karen Cohen, Société canadienne de psychologie
  • Dave Gallson, Société pour les troubles de l’humeur du Canada
  • Sergent Brian Harding
  • Glynne Hines, Légion royale canadienne (coprésidente)
  • Ed Mantler, Commission de la santé mentale du Canada (au nom de Louise Bradley)
  • Adjudant (retraité) Brian McKenna
  • Colonel Scott McLeod, médecin-chef adjoint, Forces armées canadiennes
  • Dr Patrick Smith, Association canadienne pour la santé mentale
  • Robert Thibeau, Vétérans autochtones

Absences

  • Ruth Lanius (Ph. D.), Université Western
  • Dr Don Richardson, Association des psychiatres du Canada

Observatrice

  • Commodore (retraité) Andrea Siew, Bureau de l’ombudsman des vétérans (BOV)

Cabinet du ministre

  • Ben Charland, Relations avec les intervenants

Anciens Combattants Canada

  • Joel Fillion, directeur de la Santé mentale à Anciens Combattants Canada (ACC), Groupe consultatif sur la santé mentale (coprésident)
  • Dr Jim Thompson, conseiller médical, Recherche
  • Dre Alexandra Heber, psychiatre en chef
  • Dre Sophie Brière, consultante en psychologie
  • Katherine Spencer-Ross, directrice, L'engagement des intervenants et la sensibilisation
  • Marie-Eve Chagnon, analyste, L'engagement des intervenants et la sensibilisation

Invités

  • Colonel Andrew Downes, directeur de la Santé mentale, Quartier général du Groupe des services de santé, Forces armées canadiennes (FAC)
  • Lieutenant-colonel Dave Cameron, FAC
  • Paul Hale, Association du Princess Patricia's Canadian Light Infantry (PPCLI)

Mise en garde : Veuillez prendre note que certaines personnes pourraient être troublées par le contenu du présent document qui porte sur le suicide. La lecture du document peut être pénible ou entraîner une vive réaction.

La réunion du Groupe consultatif sur la santé mentale d’ACC du 22 mars 2017 concernait essentiellement la question du suicide chez les vétérans.

Presentation : Prévention du suicide chez les vétérans des FAC

Trois professionnels de la santé du Ministère font une présentation sur les efforts de prévention du suicide du point de vue d’ACC. La présentation vise à consulter le Groupe consultatif sur la santé mentale et d’en obtenir des commentaires relativement à la Stratégie de prévention du suicide d’ACC et des FAC et au plan d’action connexe.

Le cadre d’ACC (ci-dessous) a été élaboré et mis en œuvre par ACC en 2010. Il saisit les multiples facteurs liés au suicide à différentes étapes de la voie vers le suicide, en plus de contribuer à déterminer les interventions de prévention du suicide fondées sur les connaissances.

Fondé sur le cadre de Mann (2005), Mann et coll. Suicide prevention strategies: a systematic review (JAMA). 26 octobre 2005, 294(16):2064-74.

Depuis 2010, ACC a pris des mesures pour prévenir le suicide. Celles-ci comprennent notamment la révision des protocoles, l’amélioration du Service d’aide d’ACC, l’ajout de « marqueurs » relatifs au suicide dans la base de données administrative et l’examen des dossiers de gestion de cas (pas des dossiers médicaux). Pour ACC et les FAC, la prévention du suicide fait partie de la stratégie globale de santé mentale, qui commence lors de la formation de base des FAC et se poursuit lors de la transition entre les FAC et ACC ainsi qu’après la libération. La mission de la stratégie conjointe de prévention du suicide d’ACC et des FAC consiste à prévenir le suicide chez les membres des FAC et les vétérans grâce à un cadre qui vise à comprendre les facteurs ayant une incidence sur le suicide tout au long de la vie des membres militaires et des vétérans, et à s’y attaquer. Il y a trois catégories de mesures de prévention du suicide:

  • prévention: prévention du comportement suicidaire
  • intervention: mesures à prendre lorsqu’un vétéran devient suicidaire
  • postvention: mesures postérieures au suicide d’un vétéran.

La discussion est plus générale que la stratégie elle-même, et les sujets suivants ont été abordés:

Tendances suicidaires

Les présentateurs rappellent au groupe que les tendances suicidaires (ce qui comprend les idées suicidaires, les tentatives de suicide ainsi que les décès par suicide) doivent être considérées comme une question multidimensionnelle touchée par une multitude de facteurs, notamment biologiques, psychologiques, interpersonnels, socioéconomiques, culturels, spirituels, etc. Tous ces facteurs doivent être pris en considération pour prévenir, traiter et comprendre le suicide. Le personnel médical d’ACC fait remarquer que les tendances suicidaires constituent un état temporaire qui peut être traité au moyen d’une intervention appropriée.

Les membres signalent ce qui suit:

  • le succès du traitement dépend du traitement du problème de santé mentale sous-jacent et de l’interruption de la voie conduisant au suicide, notamment en écartant les pensées liées à l’inévitabilité et au désespoir
  • les membres des FAC sont souvent réticents à demander de l’aide par crainte que cela ait une incidence défavorable sur leur carrière
  • l’accès aux statistiques et aux données sur le suicide chez les vétérans appuierait la prévention du suicide.

Transition

Les membres signalent ce qui suit:

  • l’identité des vétérans est étroitement liée au service militaire. Lors de la transition à la vie après le service militaire, ils peuvent subir des facteurs de stress du fait qu’ils doivent trouver de nouvelles sources de bien-être et un emploi civil, en plus de composer avec l’incertitude financière
  • la perte d’identité, lorsqu’elle s’ajoute à d’autres facteurs et sources de stress, peut donner lieu à de la vulnérabilité
  • la transition entre la structure très organisée et hiérarchique de la vie militaire et la vie civile constitue un défi
  • une transition sans heurt est une priorité qui doit être intégrée à la stratégie de prévention du suicide.

Incitation au suicide

ACC remarque que l’incitation au suicide (c.-à-d. lorsque le suicide d’une personne déclenche un comportement suicidaire chez ses pairs):

  • survient lorsque des personnes ont une forte identité commune et qu’il existe un lien solide entre les pairs
  • est observée chez les étudiants, les membres militaires, les Autochtones et les membres de collectivités isolées
  • est une raison pour laquelle la postvention doit mettre l’accent sur les personnes proches du défunt et au sein de sa collectivité, afin d’interrompre la voie conduisant au suicide
  • peut avoir lieu lorsque les médias, les médias sociaux ou les pairs glorifient accidentellement le suicide, présentent la mort par suicide comme une option raisonnable ou dénigrent le traitement en santé mentale (ce qui dissuade les personnes touchées de demander de l’aide). Les lignes directrices des médias concernant les communications sur le suicide constituent un guide raisonnable sur la façon d’aborder le suicide sur les plateformes sociales sans risque d’incitation au suicide (honorer le service ou la personne, et non la façon dont celle-ci est décédée).

Moyens létaux

ACC soulève la question de l’accès aux moyens létaux par les personnes vulnérables. ACC explique que, d’un point de vue professionnel, on vise à retirer l’accès aux armes à feu et à d’autres moyens létaux lorsqu’une personne est suicidaire en raison du risque accru d’impulsivité dans un moment de désespoir. Le groupe présente cependant un point de vue différent:

  • pour de nombreux membres des FAC ou vétérans possédant des armes à feu, le risque de confiscation de leurs armes les dissuade plutôt de demander de l’aide
  • les pairs et les membres de la famille doivent intervenir et proposer à la personne de conserver ses armes à feu en attendant qu’elle se sente mieux. On insiste sur le fait que c’est une bonne stratégie.

Ressources et formation

Les FAC signalent que le programme « En route vers la préparation mentale » (RVPM) a accru la sensibilisation à la santé mentale, et s’emploient à étendre la portée du programme et à réduire la stigmatisation liée aux questions de santé mentale.

Les membres mentionnent que la direction des FAC peut:

  • éliminer la stigmatisation avec une formation et une éducation accrues à tous les niveaux de la direction
  • mettre l’accent sur les tests des compétences et des connaissances, plutôt que de s’attendre à ce que la formation soit suffisante. Un membre a déclaré que les résultats dépendent de ce qui est vérifié et non de ce qui est attendu, ce qui a fait profondément écho chez tous les participants.

De plus, les participants ont discuté du Service d’aide d’ACC restructuré (1-800-268-7708):

  • cette ressource gratuite et confidentielle est disponible en tout temps à l’ensemble des vétérans (pas seulement aux clients d’ACC) et aux membres de leur famille
  • tous les préposés sont des cliniciens en santé mentale, formés afin d’être en mesure d’effectuer une brève évaluation téléphonique des problèmes de l’appelant puis d’aiguiller celui-ci à un fournisseur de soins de santé dans la collectivité du vétéran ou du membre de la famille pour un maximum de 20 séances de counseling en personne.

Tous les participants conviennent que les époux ou les parents des vétérans ont souvent joué un rôle clé pour convaincre une personne de demander de l’aide. C’est pourquoi ils devraient:

  • recevoir une formation sur le programme RVPM afin d’acquérir les compétences nécessaires pour composer avec des problèmes de santé mentale
  • savoir comment s’adresser à leurs enfants et réduire les risques liés aux problèmes hérités
  • avoir eux-mêmes accès aux services de traitement et de diagnostic.

Sensibilisation

Les participants mentionnent que les efforts de sensibilisation sont essentiels et nécessitent:

  • une collaboration avec les professionnels de la santé et les collectivités locales;
  • un suivi auprès des professionnels de la santé lorsqu’il y a un risque pour un vétéran
  • le suivi et l’identification des vétérans en situation de crise ou qui sont sans abri ou dans le système de justice
  • une plus grande collaboration avec les provinces.

Prochaines étapes

  • Après l’étape de la consultation, la stratégie d’ACC et des FAC sera terminée et tiendra compte de la rétroaction reçue des membres du Groupe consultatif sur la santé mentale
  • Un plan d’action pour la prévention du suicide d’ACC sera alors élaboré. Il sera fondé sur la Stratégie et devra être mis à jour continuellement lorsque de nouvelles données probantes deviennent disponibles.

Présentation : Commission de la santé mentale du Canada (CSMC)

Le présentateur décrit le suicide comme un problème multidimensionnel qui exige une intervention à l’échelle de la collectivité, qui doit être adaptée à chaque collectivité. Les éléments clés pour la réduction des taux de suicide dans les collectivités comprennent ce qui suit:

  • la formation de certaines personnes, dont les gardiens, les policiers, les médecins, les employeurs, les enseignants et les entraîneurs sportifs sur la façon de dépister les indices et les signes de tendances suicidaires
  • la sensibilisation générale du public, notamment dans les écoles, la formation sur le programme RVPM et les lignes directrices sur la façon dont les médias abordent le suicide
  • la restriction des moyens de suicide dans la collectivité, comme les chemins de fer, et l’éducation des pharmaciens, etc.
  • la recherche, soit l’accès aux données, l’évaluation des résultats, la détermination des populations à risque élevé
  • les sources de soutien pour chaque groupe de personnes à risque.

Un membre prévient que la Stratégie de prévention du suicide n’obtiendra à elle seule aucun résultat si elle n’est pas associée aux provinces, aux différentes collectivités et aux divers publics (Autochtones, ambulanciers paramédicaux, professionnels de la santé, la communauté LGBTA, etc.).

Présentation : Société pour les troubles de l’humeur du Canada (STHC)

La STHC a mis au point un continuum de l’état de stress post-traumatique (ESPT) afin de reconnaître, de diagnostiquer et de traiter les personnes.

Recommandations en matière de prévention du suicide:

  • élargir les programmes, mettre l’accent sur les fournisseurs de soins de santé et accroître les fonds afin de régler rapidement les problèmes de santé mentale;
  • financer des programmes de soutien par les pairs et fournir aux vétérans une formation sur ce type de soutien
  • lutter contre la stigmatisation liée à la santé mentale et accroître la sensibilisation au sein du grand public
  • inclure des renseignements des réunions du Comité permanent des anciens combattants (ACVA) dans les recommandations de la STHC.

Les membres soulèvent les points suivants:

  • les maladies mentales sont trompeuses, les pairs doivent donc être formés afin d’en reconnaître les signes
  • la postvention devient importante et permet de répondre à la question: « Qu’est ce qui m’a échappé? »
  • le tri des interventions dans le domaine médical peut parfois accroître la stigmatisation
  • les collectivités en deuil doivent reconnaître le suicide, et non en faire du sensationnalisme.

Présentation : Prévention du suicide : Association du Princess Patricia's Canadian Light Infantry (PPCLI)

  • L’Association du PPCLI est un organisme de bénévoles établi en 1917
  • Elle comprend 15 divisions au Canada, en plus de maintenir une forte présence virtuelle
  • Cette association fournit de la rétroaction, de l’aide, du soutien coordonné, du conditionnement physique, de la camaraderie, un sentiment d’avoir un but et du leadership
  • Elle a constaté une augmentation du taux de suicide chez les vétérans (après leur libération)
  • Elle estime que la prévention du suicide doit être communautaire, appuyer une transition efficace et inclure une sensibilisation proactive ainsi qu’un suivi
  • Bien que des groupes de soutien par les pairs comme l’Association du PPCLI ne soient pas spécialisés dans la santé mentale, ils peuvent fournir d’autres formes de soutien ainsi qu’un suivi personnalisé, accompagner un membre à son traitement, prêter une oreille attentive, etc.

Les participants soulignent que les groupes de soutien par les pairs doivent:

  • garder leur rôle unique en tête
  • se renseigner en suivant une formation pertinente
  • ne pas oublier de maintenir l’équilibre et de s’occuper de soi.

Prochaines étapes

  • Commentaires soutenus du Groupe consultatif à propos de la Stratégie de prévention du suicide, au besoin, et échange continu de l’information avec ACC et les FAC/le ministère de la Défense nationale
  • Communication améliorée et prestation de renseignements aux membres du Groupe consultatif.