La vie en mer
La force francophone
Transcription
LA VIE EN MER
Un navire en mer, c'est un monastère, c'est à dire qu'y a toujours
quelqu'un qui dort, pis toujours quelqu'un qui travaille.
Bon... Alors, si vous avez un quart... J'étais à bord d'un navire, entre autres,
où nous étions deux pour faire le travail de vingt-quatre heures, c'est à dire que moi
j'me l'vais pour prendre le quart à six heures, pis j'terminais à midi,
pis je r'commençais à six heures le soir, pis j'terminais à minuit.
Bon... Alors, ça, c'est... d'abord, faut toujours arriver à temps, y faut, bah...
et cætera, et cætera, pis vous faites votr' besogne durant c'temps-là. Et ça,
ça dure quatre-vingt-quatre heures par semaine parc'qu'on travaille sept jours
par semaine. On débarque pas du navire parc'que c'est la fin d'semaine,
comprenez-vous ? Alors, après ça, au long cours, avec la convention collective,
nous avions des périodes de, mettons, de midi à quatre heures,
de quatre heures huit heures, de midi à quatre et de quatre à huit.
Alors, c'était vrai le jour, c'tait vrai la nuit, en somme, on travaillait
huit heures par jour, sept jours par semaine parc'que un navire travail sept jours...
circule durant sept jours. Règle générale, chaque département
étant autonome, les gens qui sont dans les machines, en bas, pis les
gens qui sont en haut, sur le pont, qui situent l'endroit où le navire est rendu,
pis les évaluations, pis la température, pis des choses comme ça, là, le chargement
alors, eux autres, c'était leur affaire – comment c'qu'on appelle... le département
du pont, les cuisiniers, pis le steward s'occupait de l'alimentation, la literie,
pis ces choses-là. La tâche que j'aimais l'moins, c'était d'me faire réveiller à minuit
moins quart pour aller prendre mon quart à minuit. J'pense qu'y a
personne qui aimerait à s'faire réveiller la nuit pour aller faire du travail.
La nature humaine veut que le soleil se lève, on circule, le soleil se couche,
on s'prépare à s'coucher nous aussi, comprenez-vous, dans c'sens-là.
Alors, y avait ça, d'une part. D'autre part, y avait c'qu'on app'lait
du [soogie]. Faire du [soogie], c'était d'laver c'qui était pas propre.
Dans l'engin, dans l'département d'l'engin, sur le pont, c'tait la même chose,
et, l'autr' jour... y a quelques temps, j'écoutait une mère
qui se plaignait, lors d'un programme de radio, qui disait qu'son fils,
qui avait fait le cadet de l'armée, s'est vu dans l'obligation de laver
les toilettes. Imaginez-vous, quel déshonneur ! J'me disais en moi-même :
« Si l'fils avait été... Tous les fils qui étaient dans les navires marchands,
ou dans les autres navires, en plein milieu d'l'océan... tu laves ta toilette,
pis tu laves ton linge, pis tu couds des boutons... Maman n'est pas là... »
Et c'est comme ça que l'on vit à bord d'un navire. Y faut savoir
se débrouiller, êtr' très autonome et puis être prêt à
aider ton voisin si y a un besoin.
Un navire en mer, c'est très calme à l'intérieur de l'équipage parc'que,
comme j'vous dis, chacun a ses responsabilités très bien définies et
c'est là qu'y avait cette convention collective qui faisait qu'il y avait
des ententes entre l'employeur, représenté par le capitaine, et les
membres d'équipage. Le steward savait que si on arrivait dans un port
y d'vait y avoir du lait frais, pis y d'vait avoir ci, pis y d'vait avoir ça
et cætera, et cætera. Alors, y avait de la discipline
de part et d'autre, d'la part de l'employeur, d'la même manière que
les employés. J'garde d'excellents souvenirs de cette expérience-là.
C'est une expérience humaine qui est très valorisante.
Description
Jean-Luc Dutil nous décrit la vie à bord d’un navire de la marine marchande.
Jean-Luc Dutil
Jean-Luc Dutil est né à Alma le 7 septembre 1927. Alors qu’il était encore très jeune, sa famille et lui ont déménagé à Québec. Lorsque la guerre éclate, il a douze ans. Il est confronté aux horreurs de la guerre en croisant plusieurs blessés de guerre. C’est en 1944, à seize ans, qu’il décide de s’embarquer sur un vaisseau de la marine marchande. Il devient mécanicien et est également représentant syndical. Il quitte la marine marchande en 1949 et demeure très actif au sein de l’Association de la marine marchande canadienne.
Catégories
- Médium :
- Vidéo
- Propriétaire :
- Anciens Combattants Canada
- Durée :
- 4:12
- Personne interviewée :
- Jean-Luc Dutil
- Guerre ou mission :
- Seconde Guerre mondiale
- Branche :
- Marine marchande
- Grade militaire :
- Sous-officier
- Occupation :
- Mécanicien
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- Date de modification :