Quand j'me suis enrôlé, j'étais tout seul. J'avais ça dans la
tête, pis envoye par là! Je suis le genre d'homme que j'ai
toujours aimé le monde en uniforme. Je voyais les anciens
combattants qui s'en revenaient pis là ça me touchait. C'est
pour ça que moi, très jeune, je m'en ai été vers l'Armée.
J'ai menti à mon âge peut-être un peu… (rire)... j'avais 17 ans
Là, je leur disais que j'étais à veille d'avoir 18 ans, quelque
chose comme ça. Et puis… Ben ce temps là, il y a une autre chose
faut penser aussi, ce temps-là, ils prenaient n'importe qui.
Ils avaient besoin la chair à canon, comme on dit, hein?
Ils prenaient n'importe qui. R'garde mon frère moi, celui là qui est
dans l'Abitibi, y'avait deux orteils de coupés, ils l'ont pris
pareil, ils ont pas vu les orteils. (rire) Ils l'ont pris
pareil. Des choses comme ça, ça a bien, bien arrivé souvent.
Des gars qui étaient blessés d'avance pis… Ils avaient besoin des…
des volontaires. Moi, j'ai été volontaire, mon frère aussi.
Si on n'aurait pas été volontaire, qu'est ce qui aurais arrivé?
Hitler nous aurait montré à vivre, hein. C'est pas des farces
quand on y pense à ces affaires-là. C'est triste. Là, on a fait
le basic training pis l'advanced training à Valcartier. Pis,
c'était dur. Et monsieur! (rire) Des punitions là,
je m'en souviens moi. Il y avait une montagne à Valcartier.
Pis des fois, t'es jeune, tu jases avec d'autres, pis tu veux pas
arrêter, ils te donnent des punitions. Ils te faisaient monter
la montagne avec un masque à gaz dans la face. Ça c'était dur.
Pis aujourd'hui on s'en sent. On s'en sent de ça. Moi, je suis
rendu que j'ai le souffle court. On avait des bonnes lectures sur
les map reading, pis sur les… ton pays, la culture
pis ces affaires-là. J'aimais bien ça. L'entraînement elle, il y a pas
beaucoup de gars qui aimaient ça là, l'affaire de foot drill pis
des affaires là. On faisait beaucoup de marche, beaucoup de marche.
On a fini en Angleterre, qu'on faisait jusqu'à 35 milles,
35 milles… c'est ça 35 milles de marche ben des journées,
avec tes paquets dans le dos pis des affaires. Mais,
il y en a beaucoup qui ont pas été capable de tougher comme on dit.
Pis quecé que j'aimais aussi… une secousse… c'est qu'on
allait sur le champ de tir. Le champ de tir, c'était intéressant ça.
Tu dis tout même… tu te dis à toi-même : «Une bonne journée,
on va en avoir un en avant!» Mais ça… on n'est pas là
pour tuer du monde pour rien non plus, hein. Ça c'est…
c'est triste quand tu y penses. Moi, je m'ai toujours arrangé
que j'ai pas tuer quelqu'un qui défendait pas.
J'attendais toujours que le gars se défende.
Pis ça c'est, c'est pas mal le problème du soldat ça.
Faut que tu fasses attention à toi aussi, si tu fais pas attention
à toi qu'est-ce qui va arriver? Et puis, j'aimais ça.
Pis j't'encore un gars qui aime ça, j'suis un gars discipliné, puis j'aime ça.
Parce que je regrette pas une minute de ce que j'ai fait
Je l'ai fait avec plaisir, avec chagrin, avec peur, avec toute.
Mais je l'regrette pas… du tout.