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Date d’entrée en vigueur
Numéro du document
1584
Table of Contents
Objectif
L’objectif de cette politique est de fournir des directives aux arbitres concernant l’application des dispositions sur le bénéfice du doute prévues dans la Loi sur les pensions et la Loi sur le bien-être des vétérans (LBV).
Politique
Généralités
- La fonction d’un arbitre est de mener une enquête active sur le fondement d’une demande de prestations d’invalidité ou d’un autre avantage en vertu de la Loi sur les pensions ou de la Loi sur le bien-être des vétérans (« les lois »). Cette enquête consiste notamment à examiner toutes les preuves relatives à la demande afin d’en déterminer la pertinence et la vraisemblance, à apprécier les preuves et à rendre une décision écrite équitable et impartiale expliquant les motifs ayant servi de fondement à la décision.
- Conformément aux responsabilités qui se rattachent au processus décisionnel, les arbitres doivent respecter les principes énoncés dans les lois. Lorsqu’ils prennent une décision, ils doivent tirer des conclusions raisonnables en faveur du demandeur, et trancher en faveur du demandeur toute incertitude.
Tenir compte des circonstances en l’espèce et des éléments de preuve
- L’arbitre doit tirer des conclusions raisonnables en faveur du demandeur en tenant compte des circonstances en l’espèce et des éléments de preuve fournis à l’appui de la demande.
- L’expression « toutes les circonstances portées à sa connaissance » peut être interprétée comme englobant tous les facteurs, événements ou situations pertinents qui influent sur le cas ou la situation du demandeur en particulier et qui devraient être pris en considération dans le cadre des conclusions concernant la demande.
- Par « preuve », on entend toute forme de renseignement fourni à l’appui du bien-fondé d’une demande ou pour prouver l’existence ou la non-existence d’un fait en litige. Les preuves existent dans différents formats. Elles peuvent être documentaires (écrites), orales ou démonstratives (matérielles).
- Seules les preuves documentaires et matérielles sont prises en considération au premier palier de décision d’une demande de prestation d’invalidité. Suivent les descriptions des divers types :
- Preuve documentaire – par exemple : les demandes de prestations d’invalidité remplies; les documents de service, les rapports médicaux et d’hôpital; les avis écrits fournis par des « experts » tels que des médecins spécialistes; l’information publiée dans des livres ou des articles que l’on trouve dans des revues ayant fait l’objet d’un examen par les pairs; les affidavits ou les déclarations solennelles faites par une personne [comme le demandeur d’une prestation] qui jure, sous serment, de la véracité de l’information contenue aux présentes; autres formes de correspondance écrite, ce qui comprend des lettres, des déclarations non assermentées ou des rapports gouvernementaux.
- Preuve matérielle – Par exemple : radiographies, photographies, dessins, cartes, graphiques, objets ou toute autre forme de preuve physique présentée par le demandeur ou obtenue ou utilisée par l’arbitre pour aider à prouver ou à réfuter une déclaration factuelle faite par le demandeur.
- Si l’arbitre utilise de l’information (particulièrement de l’information défavorable au demandeur) qui n’a pas été présentée par le demandeur ou qui ne figure pas dans le dossier d’Anciens Combattants ou dans les documents de service du demandeur, on doit informer le demandeur du recours à cette information.
Preuve pertinente
- La preuve pertinente est une preuve qui se rapporte au problème ou aux problèmes principaux à résoudre. Pour savoir si une preuve est pertinente, il faut faire appel à la logique et examiner tous les éléments de preuve fournis.
- Pour faciliter la détermination des preuves pertinentes dans les demandes de prestations d’invalidité, l’arbitre peut poser les questions suivantes:
- Cette preuve aide-t-elle à justifier (ou à réfuter) un fait précis que le demandeur tente d’établir?
- Cette preuve aide-t-elle à établir (ou à réfuter) la principale demande faite par le demandeur?
- En cas de doute sur la pertinence de tout élément particulier de preuve, l’approche générale consiste à accepter (admettre) la preuve pour examen.
- Afin d’illustrer le concept de « pertinence », prenons comme exemple le cas suivant :
- M. X, un ancien combattant de la guerre de Corée, présente une demande de pension pour une hypoacousie qui, selon lui, est attribuable aux bruits intenses des canons auxquels il a été exposé pendant son service en Corée. Les dossiers du service militaire de M. X contiennent de la documentation qui établit son service militaire. Les dossiers médicaux relatifs au service du demandeur contiennent également un rapport médical à l’enrôlement qui indique « Aucun trouble auditif ni surdité au moment de l’enrôlement. Seuil d’audition D et G 20. Tympans intacts » et un rapport médical daté du 15 juillet 1953 se rapportant à la blessure par éclats d’obus subie au visage de l’ancien combattant à cette même date.
- À titre d’information additionnelle pour appuyer sa demande, M. X présente un rapport d’audiogramme daté du 27 janvier 2001, un autre daté du 14 octobre 2006 et la lettre d’un audiologiste daté du 1er novembre 2006, qui indique ceci : « Les tests de conduction aérienne et osseuse d’audiométrie tonale révèlent une hypoacousie neurosensorielle à haute fréquence légère à modérée, pire dans l’oreille droite. M. X fait état d’une hypoacousie de longue date, pire dans l’oreille droite. Il a des antécédents d’exposition à des bruits intenses de canons pendant son service en Corée. Il nie tout antécédent d’acouphène ou de problème à l’oreille moyenne. »
- L’arbitre devra déterminer si le rapport médical concernant la blessure au visage est pertinent pour le problème d’hypoacousie. Il pourrait l’être, particulièrement s’il indique que les éclats d’obus ont endommagé un organe ou une partie du corps qui joue un rôle dans la fonction auditive. Mais si ce rapport médical donne suffisamment d’information pour permettre à l’arbitre de déterminer que la blessure par éclats d’obus n’est pas du tout pertinente pour la demande relative à l’hypoacousie, le rapport ne doit pas servir de fondement à la détermination du droit à pension d’invalidité du demandeur pour l’hypoacousie, si c’est là la décision prise dans le cas à l’étude.
Tirer des conclusions raisonnables
- Tirer des conclusions raisonnables signifie tirer des conclusions favorables dans les circonstances où le demandeur n’a pas réellement donné de preuves justifiant directement les faits (ou la demande qu’il fait), mais a donné suffisamment d’autres preuves fiables pour qu’on puisse « déduire » le fait qu’il voulait établir comme conséquence logique des preuves présentées.
- Les conclusions doivent être tirées des preuves pertinentes présentées à l’arbitre, ainsi que des circonstances du cas.
- L’exemple qui suit illustre comment tirer des conclusions raisonnables dans une situation donnée :
- Un ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale demande une pension pour une arthrose du genou droit attribuable à une blessure qu’il a subie, prétend-il, en tombant d’un porte-mitrailleuse Bren en plein combat en France, en 1944. Pour appuyer sa demande, il inclut les éléments suivants :
- Documentation établissant son service militaire pendant cette période.
- Rapport médical de l’armée indiquant que son genou droit était normal au moment de l’enrôlement.
- Rapport médical militaire daté du 10 août 1944 indiquant, en partie, ceci : « ... jambe droite [de l’ancien combattant] enflée aujourd’hui. A de la difficulté à marcher en raison de la douleur, de l’enflure. Dit qu’il est tombé d’un porte-mitrailleuse Bren hier pendant des combats intenses près de Falaise et qu’il s’est blessé le genou... ».
- Rapport de radiographie récent d’un radiologue indiquant que le demandeur présente une grave arthrose du genou droit.
- Déclarations de la conjointe de plus de 50 ans et des deux enfants adultes de l’ancien combattant selon lesquelles l’ancien combattant se plaint constamment depuis des années de la douleur dans son genou droit et qu’il a toujours relié cette douleur à une prétendue blessure subie en temps de guerre.
- Lettre d’un orthopédiste indiquant que l’ancien combattant souffre d’arthrose au genou droit, laquelle peut être attribuable à un traumatisme ou au processus de vieillissement.
- Dans cette situation, le demandeur a donné suffisamment de renseignements fiables pour établir qu’il s’est blessé au genou droit pendant son service militaire et qu’il souffre maintenant d’une invalidité diagnostiquée appelée arthrose du genou droit. Bien qu’il n’ait pas fourni de preuve établissant clairement un lien entre la cause de l’arthrose et la blessure subie en temps de guerre, le demandeur a toutefois donné de l’information indiquant que son affection actuelle peut être attribuable, du moins en partie, à une blessure traumatique subie au genou.
- Comme aucune preuve n’indique que le demandeur a subi des blessures traumatiques au genou après la guerre, on peut, dans ce cas et à la lumière de toutes les preuves produites et de toutes les circonstances en l’espèce, tirer une conclusion favorable au demandeur selon laquelle l’arthrose découle d’une blessure au genou subie après une chute d’un porte-mitrailleuse Bren.
- Un ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale demande une pension pour une arthrose du genou droit attribuable à une blessure qu’il a subie, prétend-il, en tombant d’un porte-mitrailleuse Bren en plein combat en France, en 1944. Pour appuyer sa demande, il inclut les éléments suivants :
- Seuls la « crédibilité » et le « poids de la preuve » rattachés aux preuves contradictoires peuvent déterminer si les conclusions initialement tirées seront supplantées par les preuves contradictoires.
- Le fait de tirer des « conclusions raisonnables » sera souvent nécessaire dans les situations où le demandeur a établi que certains documents qui justifieraient la demande ont été perdus, détruits ou non créés en temps de guerre, p. ex. pendant des périodes de captivité comme prisonnier de guerre.
- Il importe que l’arbitre fasse la distinction entre le fait de tirer des conclusions favorables et le fait de tirer des conclusions non fondées simplement en raison de l’absence de preuves contredisant la demande présentée. En d’autres mots, il est inacceptable de faire des présomptions en l’absence des preuves que le demandeur serait raisonnablement susceptible de produire.
- Les conclusions favorables doivent être tirées dans les situations où le demandeur a satisfait à l’exigence de produire suffisamment d’autres preuves fiables pour que la conclusion la plus raisonnable que l’arbitre puisse tirer corresponde à celle que le demandeur tente d’établir.
Preuve crédible et non contredite
- La loi exige que l’arbitre accepte les preuves qui, en plus d’être pertinentes, sont crédibles et non contredites. En effet, l’arbitre doit tenir compte du caractère convaincant de toutes les preuves pertinentes examinées dans la détermination de la demande.
- Le mot « crédible » signifie littéralement « croyable ». La preuve n’est pas crédible lorsque d’autres faits déjà prouvés n’appuient pas l’exactitude de la preuve ou lorsqu’une personne raisonnable faisant preuve de bon sens peut conclure que l’information fournie par la preuve est impossible ou fausse.
- Voici certains des facteurs dont peut tenir compte l’arbitre pour évaluer la crédibilité de la preuve :
- exactitude générale de la preuve;
- cohérence de la preuve par rapport à d’autres preuves fiables;
- date de la preuve;
- compétences/expertise de l’auteur de la preuve;
- intérêt ou non de l’auteur de la preuve à l’égard du résultat de la demande (relié au « poids »);
- possibilité ou non de comparer objectivement l’information fournie dans la preuve avec d’autres faits prouvés véridiques;
- vraisemblance ou non de l’information contenue dans la preuve;
- dans certaines situations, correspondance ou non de la preuve documentaire avec la preuve matérielle;
- logique ou non des événements chronologiques;
- déclarations incohérentes faites antérieurement.
- C’est la preuve qui doit être crédible. La crédibilité de la personne présentant la preuve n’est pas un facteur dont il faut tenir compte. Même une personne généralement non crédible peut produire ou présenter une preuve crédible.
- Lorsqu’un demandeur présente une « preuve non contredite », aucune autre preuve ne réfute cette preuve. Par exemple, dans le cas de certaines demandes présentées, la seule preuve est la déclaration du demandeur et un diagnostic médical courant justifiant l’invalidité faisant l’objet de la demande.
- Le fait qu’il n’y ait aucune autre preuve dans les documents de service ou aucun élément signalé après la libération pour soutenir ou contredire la demande présentée ne signifie pas qu’une prestation doit être automatiquement accordée au demandeur. Il faut également examiner la preuve non contredite pour déterminer si elle est pertinente et crédible dans les circonstances. Si la preuve non contredite s’avère crédible mais non pertinente pour la résolution du problème, elle ne doit pas être prise en compte. Si la preuve s’avère pertinente mais non crédible, elle a un poids minimal ou nul. Le décideur doit expliquer pourquoi il y a absence de crédibilité.
- Les avis médicaux non contredits qui accompagnent une demande de prestation d’invalidité doivent être examinés pour en déterminer la vraisemblance. Il faut accorder un poids considérable à tout avis médical qu’un spécialiste reconnu ayant traité ou examiné le demandeur exprime dans son domaine de compétence, à moins que cet avis ne soit de toute évidence ou sans conteste fondé uniquement sur les antécédents fournis par le demandeur, ou ne soit entièrement conjectural. Par contre, un avis exprimé même par un spécialiste compétent n’est pas généralement accepté s’il est contraire au consensus médical des spécialistes reconnus du domaine. Voici certains facteurs additionnels dont il faut se rappeler pour déterminer la crédibilité et donc l’admissibilité des avis médicaux :
- si le rapport médical donne une anamnèse exacte et complète (c.-à-d. antécédents médicaux ou psychiatriques du patient);
- si l’avis est fondé sur des antécédents médicaux ou sur le compte rendu d’événements antérieurs du patient;
- si les avis contenus dans les présentes s’opposent aux Lignes directrices sur l’admissibilité au droit à pension, aux Directives médicales (dans le cas des affections pour lesquelles il n’y a aucune ligne directrice sur l’admissibilité au droit à pension) ou à la Table des invalidités;
- si la preuve médicale concerne le demandeur ou un tiers;
- s’il s’agit d’un avis médical diagnostique ou seulement d’un rapport détaillant le traitement actuel du demandeur.
Traumatisme sexuel
- Cette section de la politique clarifie l’approche adoptée par Anciens Combattants Canada dans le règlement des demandes de prestations d’invalidité qui comportent des allégations de traumatisme sexuel. Les traumatismes sexuels comprennent les incidents d’agression sexuelle et/ou de harcèlement sexuel. Bien que des éléments supplémentaires soient nécessaires pour établir l’admissibilité (p. ex. le lien avec le service), ACC acceptera qu’un ou des incidents de traumatisme sexuel se soient produits tel que décrit dans la déclaration crédible du demandeur, à condition que cela ne soit pas contredit par d’autres preuves. Pour plus de clarté :
- La survenance d’un ou de plusieurs incidents de traumatisme sexuel peut être établie uniquement sur la base de la déclaration crédible du demandeur;
- La crédibilité de la déclaration d’un demandeur ne sera pas touchée négativement par la décision du demandeur de ne pas signaler l’incident ou les incidents de traumatisme sexuel avant de demander des prestations d’invalidité;
- Le demandeur ne sera pas tenu de fournir des preuves confirmant que le traumatisme sexuel s’est produit tel que décrit dans sa déclaration, à condition que la déclaration ne soit pas contredite par d’autres preuves disponibles (par exemple, des renseignements contenus dans les documents sur le service militaire du demandeur).
- Pour de plus amples renseignements sur le règlement des demandes relatives aux traumatismes sexuels, voir la politique sur le principe d’indemnisation et la politique sur le principe d’assurance.
Trancher toute incertitude en faveur du demandeur
- L’exigence de « trancher toute incertitude en faveur du demandeur » s’applique tout au long du processus décisionnel quand on évalue le « poids » de la preuve. Cette exigence devient particulièrement importante dans les situations où les faits d’un cas sont étroitement équilibrés et où l’arbitre a de la difficulté à décider si le droit à pension doit être accordé. Cette exigence ne doit jamais être utilisée comme substitut à un manque de preuves.
- En général, le « poids » d’un élément de preuve renvoie à l’importance qu’on lui donne. Lorsqu’un arbitre « pèse » la preuve, il examine sa pertinence, sa fiabilité (crédibilité) et la force des conclusions auxquelles elle donne lieu.
- Si, après avoir pesé toutes les preuves pertinentes et crédibles (dont les preuves douteuses ou non contredites) et avoir tiré toutes les conclusions raisonnables et favorables permises par la preuve, l’arbitre peut indiquer clairement par oui ou non si le cas du demandeur a été établi, une décision doit donc être prise à la lumière des faits établis.
- Dans les situations où le demandeur n’a pas établi clairement son cas, mais a produit suffisamment de preuves crédibles pour justifier la demande et créer au moins un doute raisonnable dans l’esprit de l’arbitre quant à son droit à la pension, ce doute doit être résolu en faveur du demandeur.
Références
Loi sur les pensions, paragraphe 5(3)
Loi sur le bien-être des vétérans, article 43
Lignes directrices sur l'admissibilité au droit à pension
Prestations d’invalidité versées à l’égard du service en temps de paix – Principe d’indemnisation