Comment était votre moral à cette époque-là?
Ça dépendait de la journée.
Le moral était comme je vous dis, « up and down »
tout dépendamment des journées.
Des journées où j’avais besoin de plus de médication,
c’était plus « down », des journées ça allait mieux.
Le fait aussi d’être avec d’autres de mes confrères
qui avaient été blessés en même temps que moi,
c’était une motivation dans le sens qu’on était capables
de se motiver un et l’autre par rapport à ça, je pense que ça a aidé
beaucoup dans le moral, surtout quand on est tous redevenus
les trois au même niveau de réhabilitation,
de pouvoir se challenger un niveau de plus.
Parce qu’à la base, dans ma tête à moi,
pratiquement le lendemain que je me suis rendu compte
que j’avais été blessé, j’étais prêt à retourner au front.
Pratiquement tous les soldats qui ont été blessés ont ce feeling là,
c’est pas grave, mets-moi un pansement, mets-moi une bottine,
une attelle, je vais y retourner, c’est pas grave.
Mais tu réalises assez rapidement que ce ne sera pas possible,
en tout cas, pas à court terme.
Avec les blessures, juste le fait, justement,
qu’ils te donnent une première prothèse, juste de se tenir debout,
c’est là que tu réalises que c’est pas aussi
facile qu’on pense marcher au quotidien.
On se lève le matin, on s’habille,
on se rend compte de rien, tout se fait naturellement.
Mais quand on perd une jambe, juste le fait de se tenir
en équilibre debout ça demande une certaine énergie,
une certaine concentration.
C’est là que tu réalises que ça va prendre plus de temps
que je pensais et ça peut venir jouer sur le moral aussi.
Est-ce que la blessure a mis fin à votre carrière dans les Forces?
Pas encore!
Éventuellement, oui!
Éventuellement ça va me rattraper, je ne rajeunis pas.
J’ai été blessé, j’avais 3 ans d’armée,
puis là je vais commencer ma 13e année en fait.
J’ai réussi à rester dans le système, j’ai fait les tests physiques
qu’ils me demandaient de faire, pour la plupart.
Le fait de faire du sport m’a énormément aidé.
Éventuellement, il va y avoir une libération médicale
qui va s’ensuivre dans la prochaine année, par rapport à ça.
Donc, au cours des 10 dernières années,
donc après votre blessure, vous êtes toujours actif,
vous êtes régulier dans les Forces?
Au cours des 10 dernières années, en général,
j’ai été actif au sein des Forces, j’ai eu la chance
d’être instructeur en premiers soins, pendant environ 4 ou 5 ans,
j’ai donné des formations, bizarrement, au niveau des fractures.
J’ai fait ça pendant quelques années.
J’ai eu la chance d’être attitré dans un peloton de reconnaissance
au 3e Bataillon, où j’ai pu être plus au niveau du support des gars
qui étaient déployés dans un QM,
ce qui est plus administratif, côté équipement,
commander, entretenir des armes, des choses
comme ça, stocker toutes ces affaires-là,
qui est une job que quelqu’un faut qu’il fasse, de toute façon.
Par la suite, j’ai aussi eu la chance de travailler à Range Control
qui est où il y a tous les champs de tirs « live », de tirs réels
ou de tirs à blanc se font, j’étais en charge de faire les patrouilles
dans les secteurs et m’assurer que tout est en ordre et tout se
faisait correctement, autant quand les troupes étaient là
que quand elles avaient fini, ramassaient toutes leurs choses
correctement, que tout était propre pour la prochaine unité
qui allait prendre le secteur.
Je l’ai fait pendant quelques années.
À travers tout ça, j’ai eu la chance de faire du sport,
de voyager pas mal,
ce que l’Armée me laissait faire aussi à travers tout ça.